PROTECTION DES ESPÈCES

PROTECTION DES ESPÈCES
PROTECTION DES ESPÈCES

L’expression d’une volonté de protection de la nature est relativement récente dans l’histoire des sociétés humaines. Si l’on adopte comme critère principal la mise en place d’aires protégées – réserves ou parcs naturels – on en relève les premiers signes à la fin du XIXe siècle, avec la création aux États-Unis, en 1872, du premier parc national du monde, celui du Yellowstone. Il faut cependant attendre la première moitié du XXe siècle pour voir ce mouvement s’affirmer: en Europe, les premiers parcs naturels sont créés, par la Suède, en 1909; suivent la Suisse (1915) et la Grande-Bretagne (1949). En France, la réaction est plus tardive encore, si l’on excepte l’initiative particulière de la Société nationale de protection de la nature, association privée à but scientifique et philanthropique, qui crée en 1928 la réserve zoologique et botanique de Camargue. Ce n’est qu’en 1960 que fut votée la loi sur les parcs nationaux, et en 1963 que le premier d’entre eux, celui de la Vanoise, fut ouvert.

L’Union internationale pour la protection de la nature (U.I.P.N.) est constituée en 1948. Sa transformation, huit ans plus tard, en Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (U.I.C.N.) entérine l’idée que la préservation de la nature doit s’inscrire dans une perspective plus large. La publication par l’U.I.C.N., l’U.N.E.P. (Programme des Nations unies pour l’environnement) et le W.W.F. (Fonds mondial pour la nature) de la Stratégie mondiale de la conservation, en 1980, marque une nouvelle étape: elle souligne le besoin de sauvegarder les processus écologiques et donc de maintenir des espaces protégés, mais en accordant une place importante aux exigences de développement économique. Cette évolution a été marquée par deux sommets planétaires: la Conférence des Nations unies sur l’environnement de Stockholm qui, en 1972, fait des problèmes d’environnement une priorité pour les gouvernements de la planète; la Conférence des Nations unies pour l’environnement et le développement de Rio de Janeiro qui, en 1992, à partir d’un éclairage porté sur l’érosion de la biodiversité et sur les menaces de changements climatiques, souligne l’interdépendance entre développement et protection de l’environnement.

La mort des espèces, comme celle des individus, est un phénomène naturel, destinée inexorable. À partir de l’analyse des restes fossiles, les paléontologues estiment que la durée moyenne de vie des espèces est comprise entre 1 et 2 millions d’années pour les mammifères, et autour de 10 millions d’années pour les invertébrés terrestres ou marins. En outre, ils ont mis en relief cinq grandes crises d’extinction au cours des temps géologiques, qui éliminèrent entre 65 et 85 p. 100 des espèces et jusqu’à 95 p. 100 au Permien, il y a 250 millions d’années. La plus connue de ces extinctions massives, celle du Crétacé-Tertiaire (il y a 65 millions d’années), fut notamment marquée par la disparition des dinosaures, parmi de nombreuses autres espèces. À l’origine de ces catastrophes, qui s’étalèrent toutefois sur plusieurs milliers, voire millions d’années, on évoque des cataclysmes d’origine interne ou externe à la Terre, comme des éruptions volcaniques ou des chutes de météorites.

La crise d’extinction actuelle diffère des précédentes: elle est le fait de l’homme et s’inscrit, non plus sur des millions d’années, mais seulement quelques siècles, voire quelques décennies (cf. tableau). Elle résulte de quatre phénomènes: la dégradation des milieux (pollutions, fragmentation de l’habitat, déforestation, etc.); la surexploitation des espèces (chasse, pêche, récolte); l’introduction d’espèces exotiques (destructeurs de l’habitat comme les chèvres et les moutons, prédateurs ou compétiteurs efficaces comme les chats et les chiens, vecteurs de maladies comme les rats et les moustiques); les extinctions en cascade, qui résultent, par exemple, de la disparition d’une espèce clé.

On sait que c’est la réduction des effectifs et de la diversité génétique des populations qui précipite les espèces vers l’extinction et qu’il existe un lien étroit entre la superficie du milieu habitable, l’effectif des populations considérées et la richesse spécifique locale. Cela permet de souligner que le point clé, pour une conservation durable de la biodiversité, est la sauvegarde ou la restauration de milieux naturels diversifiés de superficie importante. Mais notre espèce aussi a besoin d’espace! Là est le problème. De fait, au-delà des facteurs immédiats, qui conduisent des espèces à l’extinction, il faut considérer les causes premières, toutes liées à ce que l’on peut appeler le succès écologique de l’espèce Homo sapiens sapiens : l’augmentation de la population humaine et de ses besoins en ressources naturelles (on estime qu’elle consomme, détourne ou accapare 39 p. 100 de la production végétale terrestre); le poids croissant d’un système économique qui prend peu en compte l’environnement, le renouvellement des ressources naturelles et l’intérêt des générations futures; la mondialisation de l’économie et la réduction de la gamme des produits provenant de l’agriculture, de la sylviculture ou de la pêche; la prédominance de systèmes législatifs et institutionnels favorisant l’exploitation non durable des ressources; l’insuffisance des connaissances et de leurs applications.

Face à cette situation de crise, trois types de mesures sont mis en œuvre pour protéger les espèces: la création d’espaces protégés, parcs ou réserves; l’élaboration de réglementations et d’interdictions; la protection ex situ et le recours aux techniques de réintroductions et de renforcements des populations.

1. Les espaces protégés

Définitions

Une aire protégée est, selon l’U.I.C.N, «une zone de terre ou de mer particulièrement consacrée à la protection de la biodiversité et des ressources naturelles et culturelles qui lui sont associées, et gérée selon des lois ou d’autres moyens efficaces».

On compte, dans le monde entier, plus de quatre mille cinq cents aires protégées représentant, avec une superficie totale de 4,5 millions de kilomètres carrés, environ 3,5 p. 100 des terres émergées.

En France, départements d’outre-mer (D.O.M.) compris, on dénombrait, en 1997, 129 réserves naturelles (dont 7 dans les D.O.M.), couvrant 131 418 hectares en métropole et 188 149 hectares dans les D.O.M., et 7 parcs nationaux (dont 1 en Guadeloupe), s’étendant sur 353 865 hectares en métropole et 17 381 hectares en Guadeloupe.

En matière d’espace protégé, il convient d’accorder une attention particulière à ce que l’on appelle les réserves de biosphère. C’est en 1974 qu’un groupe de travail du programme sur L’Homme et la biosphère de l’U.N.E.S.C.O. émet l’idée de réserve de biosphère. L’originalité du concept, par rapport à la perception classique des réserves et à l’opinion qui prévalait à l’époque en matière de protection de la nature, est de prendre en compte simultanément les objectifs de conservation et de développement. Les réserves classiques sont définies par rapport à la nature; les réserves de la biosphère partent d’interrogations et de réflexions sur les relations entre les sociétés humaines et leur environnement naturel. Celles-ci ont été conçues pour répondre à l’une des questions essentielles qui se posent aujourd’hui: comment concilier la conservation de la biodiversité et des ressources biologiques avec leur utilisation durable?

Les réserves de la biosphère sont des aires protégées aménagées à titre individuel par les États, qui les soumettent à l’approbation de l’U.N.E.S.C.O. pour leur insertion dans le réseau mondial des réserves de la biosphère.

Chaque réserve de biosphère doit remplir trois fonctions fondamentales, qui sont complémentaires et interactives:

– une fonction de conservation, pour assurer la sauvegarde des paysages, des écosystèmes, des espèces et de la variabilité génétique;

– une fonction de développement, pour encourager une économie durable au niveau local sur les plans écologique, sociologique et culturel;

– une fonction logistique, pour la recherche, la surveillance continue, la formation et l’éducation en matière de conservation et de développement durable aux niveaux local, régional et planétaire.

Ces aires comportent: une zone centrale strictement protégée, une zone tampon, où peuvent s’exercer des activités non destructrices soigneusement réglementées et une zone de transition permettant le développement d’activités économiques durables, compatibles avec l’environnement. Elles associent donc résolument la conservation – qui est leur objectif ultime – et le développement durable dans les principaux écosystèmes de la planète. Elles constituent aussi un réseau mondial de recherche et de surveillance écologique et contribuent à sensibiliser, éduquer et former aux problèmes d’environnement.

L’U.N.E.S.C.O. a approuvé la création de 324 réserves de la biosphère, dont 127 en Europe. Cinq sont implantées en France: Camargue, Cévennes, vallée du Fango (Corse), Iroise (partie de l’Atlantique s’étendant au large de la Bretagne) et Vosges du Nord.

Les attributs d’une bonne réserve

Les réserves doivent être conçues de manière à satisfaire les objectifs qui ont conduit à en décider la mise en place. Au-delà de spécificités écologiques propres aux espèces ou aux écosystèmes concernés, la théorie de la biogéographie insulaire de Robert MacArthur et Edward Wilson et les modèles de populations minimales viables constituent des bases utiles pour orienter les choix.

La taille est le premier critère à considérer, puisque la richesse spécifique des peuplements et les effectifs des populations dépendent d’abord de la superficie de l’aire protégée. Ainsi, si l’objectif est de sauvegarder une population durable d’ours grizzlis, il faudra envisager la mise en réserve de quelque 13 000 à 14 000 kilomètres carrés d’habitat favorable à cette espèce pour abriter une population viable de 50 à 90 individus. On pourra se contenter, en revanche, de réserves de quelques hectares pour préserver certaines populations d’insectes.

Un vaste débat a divisé les théoriciens de la conservation, «popularisé» par la dénomination de S.L.O.S.S., (Single Large Or Several Small). En d’autres termes, optimise-t-on mieux la conservation par une seule réserve de grande superficie ou par plusieurs petites, représentant éventuellement au total une superficie équivalente?

C’est Jared Diamond qui, frappé par le caractère insulaire des réserves, a, le premier, en 1975, prôné explicitement l’application de règles issues de la théorie de la biogéographie insulaire pour la conception des aires protégées. La superficie, la forme et le degré d’isolation par rapport à des types de milieux similaires sont des éléments essentiels à considérer. Ainsi, de grandes réserves, d’un seul tenant, permettraient d’assurer plus efficacement la conservation de davantage d’espèces que de plus petites couvrant, au total, une même superficie; de même, des réserves proches les unes des autres, ou liées par des corridors protégés d’habitat naturel, permettront de sauvegarder plus d’espèces que des réserves isolées ou éloignées les unes des autres.

La réponse aux questions posées par l’interrogation S.L.O.S.S. dépend de divers éléments: la différence entre les probabilités d’extinction des petites et grandes populations concernées; le nombre des populations en cause; l’importance des fluctuations interannuelles des conditions environnementales et spécialement leur degré de corrélation entre parcelles différentes; la probabilité de recolonisation après extinction locale.

Ainsi, quatre petites réserves pourront conférer un temps de persistance supérieur à celui d’une seule grande réserve de même surface totale s’il n’y a pas de possibilité de recolonisation et si les fluctuations des conditions environnementales ne sont pas corrélées dans les petites réserves entre elles.

2. Les mesures légales

Les listes rouges

Actuellement, deux organisations internationales définissent le statut des espèces animales et végétales du globe: l’U.I.C.N., qui s’occupe de toutes les espèces, et la Convention sur le commerce international des espèces en danger (C.I.T.E.S.).

Le système actuel de classification des espèces en danger s’est développé à partir de l’usage des livres ou listes rouges de l’U.I.C.N. Au début des années 1960, le rôle de ces documents était de fournir l’information sur la distribution géographique des espèces en attirant l’attention sur celles qui se trouvaient menacées. Avec le temps, les livres rouges commencèrent à dégager des priorités et à classer les espèces par ordre croissant de besoins de conservation, en distinguant des espèces «en danger», «menacées» ou «vulnérables», selon le niveau de risque. Les résultats sont satisfaisants, au moins pour les oiseaux et les mammifères. En revanche, plantes et invertébrés furent moins bien répertoriés, et cette lacune entraîna certains biologistes à suggérer que l’on devrait plutôt concentrer les efforts sur la conservation des peuplements et des écosystèmes en danger. Ainsi, certains pays ciblent maintenant leurs lois sur la protection des milieux.

De nombreux États ont utilisé le modèle des listes rouges pour définir leurs propres approches de la protection des espèces en danger. Utile en général, ce système a pu occasionnellement provoquer des bévues. En particulier, une espèce à vaste répartition et en pleine vitalité est parfois perçue comme rare, parce que considérée dans un pays situé en bordure de son aire géographique. L’avocette et le balbuzard pêcheur en sont d’excellents exemples. Depuis 1950, ces deux espèces ont recolonisé la Grande-Bretagne, où des naturalistes avisés ont soigneusement gardé leurs nids et suivi leurs populations. Ainsi, ces deux espèces ont inspiré une attention conservationniste croissante, bien qu’aucune ne fût en danger à l’échelle planétaire.

Autre problème: les listes rouges donnent la plus grande importance aux espèces hautement menacées, lorsque l’espoir d’une protection efficace au moment de leur inscription est mince. Peut-être serait-il préférable, par souci d’efficacité, de privilégier les espèces pour lesquelles une chance raisonnable d’échapper à l’extinction existe.

Environnementalistes, juristes et politiciens demandent des moyens – scientifiques et politiques – plus acceptables pour déterminer si une espèce est en danger. Les tentatives légales pour protéger des espèces en danger se heurtent souvent à l’insuffisance de données scientifiques. De fait, on connaît si peu de chose sur la grande majorité des espèces – et moins encore sur leurs rôles dans le fonctionnement des écosystèmes – qu’on se trouve confronté au dilemme suivant: créer des lois pour sauver toutes les espèces possibles ou bien privilégier quelques-unes d’entre elles qui, exigeant de grandes étendues d’habitat, opèrent en tant qu’«espèces parapluies». Légiférer à propos de telles espèces revient à en protéger du même coup une multitude d’autres, relativement inconnues, qui partagent le même milieu. La protection de la chouette tachetée du nord-ouest des États-Unis donne un exemple de cette stratégie.

La chouette tachetée septentrionale, (Strix occidentalis caurina ) habite les forêts de pins Douglas du nord-ouest des États-Unis. Ces forêts sont qualifiées de «vieilles» parce que beaucoup de leurs arbres sont multicentenaires, encroûtés de lichens et autres petites plantes épiphytes, qui contribuent à former une canopée complexe. Pendant des décennies, les amateurs d’oiseaux avaient repéré cette espèce comme un résident peu commun de ces forêts du nord-ouest des États-Unis, mais à peu près rien d’autre n’était connu sur elle jusqu’à la fin des années 1960. En 1967, un étudiant de l’université d’État de l’Oregon enregistra les chants de la chouette et put cartographier la distribution de l’espèce dans l’Oregon; son travail révéla que la chouette tachetée vivait exclusivement dans les vieilles forêts de la côte nord-ouest des États-Unis. Il montra que chaque couple demande un domaine vital de 2 600 hectares, dont 1 000 devant être constitués par de la vieille forêt. Jusqu’en 1990, l’exploitation continue de ces forêts avait rapidement réduit le nombre des fragments d’habitat suffisamment vastes pour entretenir des chouettes tachetées. La Cour fédérale suspendit alors l’exploitation de ces forêts jusqu’à ce qu’un plan de préservation puisse être mis en œuvre.

Les besoins de la chouette en matière d’habitat se trouvaient en conflit direct avec les intérêts de l’industrie forestière, qui cherchait à remplacer les vieilles forêts, à croissance lente, par des lots à croissance rapide, exploitables au bout de soixante à quatre-vingts ans. Depuis les années 1950 principalement, l’exploitation des forêts, les incendies et les éclaircies pour l’agriculture avaient réduit les vieilles forêts du nord-ouest du Pacifique à moins de 10 p. 100 de leur aire d’origine. Comme ces forêts hébergent de nombreuses espèces animales et végétales uniques, la chouette tachetée a servi d’espèce parapluie, et sa protection contribua à assurer aussi la survie durable de beaucoup d’autres, moins «médiatiques».

La chouette tachetée septentrionale est l’une des trois sous-espèces de Strix occidentalis , ce qui a conduit l’industrie forestière à faire valoir que ladite chouette n’était pas aussi unique que cela et que sa protection, accomplie au prix d’un ralentissement de la production de bois, donc de pertes d’emplois, n’était pas justifiée. Cet argument ignore le fait que la majorité des emplois liés à l’exploitation du bois seront perdus une fois la forêt complètement exploitée. Au rythme d’exploitation élevé des années 1980, la plus grande partie de la vieille forêt aurait disparu vers 1995, et avec elle les emplois qui lui étaient liés.

Si les tentatives pour sauver la chouette tachetée ont coûté quelques emplois dans l’industrie du bois, elles en ont aussi créé d’autres, la plupart dans des secteurs différents, spécialement dans les domaines de l’environnement et de l’éducation, à travers la découverte des oiseaux et de leur écologie. À la faveur de ces études, les biologistes ont développé des modèles plus réalistes pour les espèces distribuées en métapopulations, c’est-à-dire des populations séparées dans l’espace mais interconnectées par des flux d’individus. Tout cela a contribué à éclairer les débats sur l’évaluation des risques d’extinction pour d’autres espèces en danger.

La loi sur les espèces en danger des États-Unis

La loi sur les espèces en danger des États-Unis (The Endangered Species Act) a été signée par Richard Nixon en 1973. La décision d’inscrire une espèce comme «en danger» est prononcée quand l’une des cinq conditions suivantes est remplie: la destruction de son habitat est avérée; l’espèce est surexploitée (les individus sont éliminés à un taux supérieur à celui de leur reproduction); elle souffre de pertes par maladies ou par prédation; les lois existantes sont inadéquates pour protéger l’espèce; il y a d’autres facteurs, naturels ou anthropogéniques, qui affectent sa persistance.

Une fois inscrite sur la liste, l’espèce ou la population considérée ne peut être affectée, c’est-à-dire que les agences fédérales ne peuvent autoriser, financer ou conduire aucune action de nature à menacer sa persistance.

Actuellement, c’est un système à deux niveaux, sur le modèle des livres rouges de l’U.I.C.N., qui classe toute espèce inscrite soit comme «en danger», soit comme «menacée». Une espèce «en danger» est «toute espèce menacée d’extinction sur tout ou partie de son aire»; une espèce «menacée» est «toute espèce qui, selon toute vraisemblance, pourrait devenir en danger dans un futur prévisible». Les espèces inscrites comme «en danger» ou «menacées», à la fois dans le monde et aux États-Unis, sont inégalement distribuées entre les différents groupes biologiques. Il y a un biais évident en faveur des mammifères et des oiseaux, les groupes les plus négligés étant les invertébrés et les plantes. Cela traduit, dans une certaine mesure, la fascination des hommes pour les mammifères et les oiseaux. Il faut également signaler que les spécialistes qui les étudient sont plus nombreux. Par ailleurs, le déséquilibre vient aussi probablement du fait que les spécialistes retiennent délibérément des espèces à exigences d’espace élevées, parce qu’elles jouent le rôle d’espèces parapluies et contribuent à protéger des écosystèmes spécifiques.

Une fois l’espèce enregistrée, la loi préconise qu’un plan de restauration soit mis en œuvre pour éliminer les risques d’extinction. Des critiques se sont élevées contre cette loi, malgré son succès évident. Outre les biais taxonomiques décrits ci-dessus, deux problèmes supplémentaires ont été relevés: la lenteur avec laquelle les espèces sont inscrites et l’effectif réel des populations quand elles sont inscrites, problèmes d’ailleurs liés. En effet, au moment où l’espèce est enregistrée, son effectif a sans doute encore beaucoup décru, et se situe à un stade où la réversibilité est peut-être compromise (habitat détruit, par exemple).

La directive européenne Habitats-faune-flore

Le 21 mai 1992, le Conseil des ministres de la Communauté européenne adoptait la directive 92/43, ou directive «Habitats-faune-flore». Elle a pour objectifs, d’où son nom, de «contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages sur le territoire européen». Cela doit aboutir à la constitution d’un réseau européen de sites, le réseau Natura 2000. Tous les six ans, un rapport rendant compte de l’application de la directive doit être établi par chaque État membre.

La directive détermine, par ailleurs, les recherches et les travaux scientifiques nécessaires à ses objectifs ainsi que les procédures de réintroduction d’espèces indigènes et d’introduction éventuelle d’espèces non indigènes. Les mesures de protection s’appliquent actuellement à 293 espèces animales et 490 espèces végétales, dont, respectivement, 141 et 62 sont présentes en France. Citons, à titre d’exemple, la loutre d’Europe, la tortue d’Hermann, l’euprocte des Pyrénées, le papillon Apollon et l’orchidée spiranthe d’été.

L’un des objectifs majeurs de la directive est de maintenir ou de restaurer les habitats naturels et les espèces d’intérêt européen dans des conditions favorables, en établissant des aires spéciales de conservation. Une attention particulière doit être accordée à plus de deux cents types d’habitats et aux sites qui hébergent des espèces protégées. Ce sont ces aires spéciales de conservation qui doivent former le réseau écologique de sites Natura 2000 et permettre la réussite des objectifs fixés par la directive.

3. La protection ex situ

La gestion des ressources génétiques

Le concept de ressources génétiques a émergé dans le contexte de la sélection des plantes et des animaux domestiques. L’expression recouvre l’ensemble des espèces, races, variétés et génotypes, qui peuvent être utilisés à cette fin pour une plante ou un animal donné.

À l’origine, les premiers sélectionneurs de plantes puisaient dans les variétés locales, appelées aussi cultivars primitifs. Progressivement, se sont imposés des cultivars modernes, protégés eux par un droit d’obtention végétale. Ces lignées de sélection et l’ensemble du matériel sont le produit du travail des sélectionneurs. Obtenues en conditions contrôlées, leurs caractéristiques génétiques sont bien connues. Cela explique leur importante valeur pour les entreprises qui en ont la propriété: là est la base de leur compétitivité.

Enfin, on ne peut passer sous silence une dernière source ou composante des ressources génétiques, les formes sauvages et adventices, qui prennent de plus en plus d’importance dans le contexte actuel d’érosion de la biodiversité. Elles représentent un réservoir de diversité génétique qui, encore immergé dans son environnement naturel et en interaction avec celui-ci, poursuit une évolution interdite aux formes cultivées modernes. Les sélectionneurs n’y puisent cependant qu’en dernier recours, car elles véhiculent aussi, évidemment, des spécificités indissociables propres à leur caractère sauvage. Avec les progrès de la biologie, non seulement les formes sauvages de la même espèce biologique (le pool génique primaire) peuvent être utilisées, mais aussi les espèces apparentées (pool secondaire), voire les espèces des genres voisins (pool tertiaire), sans qu’il y ait de limite théorique (Chauvet et Olivier, 1993).

Comme dans d’autres domaines de la conservation, les acteurs et les modalités mises en œuvre – adaptées évidemment aux objectifs et motivations propres à chacun – sont divers. Il s’agit:

– des instituts de recherche, avec les banques de gènes qu’ils gèrent et entretiennent;

– du secteur privé, constitué notamment par les firmes semencières qui entretiennent des collections de travail et des lignées de sélection très précieuses;

– des gestionnaires de patrimoine, tels les parcs naturels régionaux, à l’origine de programmes de conservation élaborés et de la relance des produits du terroir.

Les collections de ressources génétiques sont couramment appelées banques de gènes. Elles sont conservées de différentes façons, selon les types biologiques considérés: en verger pour les arbres fruitiers; en champ pour les plantes pérennes à multiplication végétative; en chambres froides (à + 4 0C ou à — 20 0C) pour les plantes à graines. Le recours à des techniques de conservation plus élaborées, comme le maintien dans l’azote liquide, est possible pour les cas difficiles ou pour réduire le coût de la conservation et accroître l’intervalle entre chaque régénération, évitant ainsi les risques de dérive génétique.

Chez la majorité des espèces de plantes, les graines sont adaptées pour survivre dans le sol, parfois jusqu’à plusieurs dizaines d’années. De telles graines, que l’on appelle semences orthodoxes, se conservent aisément, après séchage, à + 4 0C ou, mieux, à — 20 0C. De fait, la longévité des graines est d’autant plus grande que l’on abaisse la température de conservation. Ainsi, dans les conditions optimales, les graines de céréales peuvent conserver leur capacité de germination jusqu’à une centaine d’années; les graines de lotus atteignent plusieurs centaines d’années et le record est détenu par un lupin, avec plus de dix mille ans.

On qualifie de récalcitrantes les graines qui ne se comportent pas de façon normale. Il s’agit, en particulier, de grosses graines comme les glands de chênes ou celles de nombreux arbres tropicaux. Ces graines sont détruites par le froid ou elles n’ont aucune dormance et germent dès qu’elles sont tombées au sol. On a recours alors à d’autres techniques de conservation, au champ (verger ou arboretum) ou in vitro. La conservation in vitro consiste à prélever des fragments de plantes et à les garder en conditions contrôlées sur support de gélose en éprouvette. Cette technique de culture in vitro est plutôt utilisée pour la production en masse de plantes horticoles. L’objectif de conservation suppose, au contraire, de ralentir la croissance. On a alors recours à la cryogénie: les fragments prélevés sont maintenus dans l’azote liquide (de — 150 0C à — 196 0C), ce qui permet une conservation à très long terme.

La gestion des banques de gènes est cependant assez lourde: ces banques nécessitent un entretien et un suivi régulier, qui tendent à se relâcher avec le temps. Elles présentent, en outre, le double inconvénient d’être soumises à des pressions de sélection spécifiques (propres aux conditions de conservation et d’entretien) et d’échapper à la sélection naturelle. Certains généticiens des populations considèrent donc qu’un tel mode de conservation statique ne permettrait pas de fournir les caractères d’adaptation aux changements de l’environnement. Aussi l’idée a-t-elle été émise de développer des modes de conservation dynamique, en cultivant au champ des populations très hétérogènes, qui pourraient évoluer librement et faire apparaître des combinaisons de caractères inédites (Chauvet et Olivier, 1993).

Pour les races d’animaux domestiques, l’entretien de troupeaux in situ reste la meilleure stratégie. Malgré son coût, diverses associations et institutions ont mis en place des programmes de conservation.

Les parcs zoologiques

Système de conservation des espèces animales très ancien, les parcs zoologiques ont permis la sauvegarde de plusieurs espèces. En 1923, le bison d’Europe n’existait plus qu’en captivité. Il a pu être réintroduit avec succès dans les forêts polonaises. Il en est de même de l’oryx d’Arabie, anéanti dans les années 1960, et récemment réintroduit en Arabie Saoudite et en Oman. En 1997, un programme était en cours pour le cheval de Przewalsky, avec un troupeau vivant en semi-captivité dans le parc national des Cévennes, avant l’étape décisive de sa réintroduction en Mongolie.

Pour les populations captives dans le monde, une série de livres généalogiques, ou stud-books , ont été élaborés. Cent quatre registres de ce type sont actuellement reconnus par la commission pour la survie des espèces de l’U.I.C.N. Quatre-vingt-cinq d’entre eux concernent les mammifères, un les amphibiens, quatre les reptiles et dix-neuf les oiseaux.

Dans la mesure où, comme on l’a vu, l’espérance de survie d’une population dépend de sa faculté d’adaptation aux variations de l’environnement, l’existence en son sein d’une diversité génétique suffisante est une condition fondamentale à prendre en compte. Cela suppose donc une gestion particulière des populations captives et, en particulier, de la conduite de la reproduction. On est encore loin d’atteindre les conditions satisfaisantes, qui consisteraient à traiter les échantillons captifs comme des éléments d’une population biologique à part entière. Ainsi, un recensement, effectué au début des années 1980 par l’International Tiger Studbook, montrait que sur mille deux cents tigres de Sibérie captifs, soixante seulement étaient issus du milieu naturel et, parmi eux, six avaient contribué à l’apport de 60 p. 100 des gènes. Cela veut dire que la plus grande partie de la diversité originelle a été perdue et que le taux de consanguinité de la population captive est très élevé.

4. Les réintroductions et renforcements de populations

La réintroduction du vautour fauve dans les Cévennes

L’évolution des populations dépend, d’une part, des capacités naturelles des individus à survivre et à se reproduire et, d’autre part, des interactions des individus avec l’environnement (climat, ressources, autres populations). Les démographes élaborent des modèles mathématiques, qui intègrent ces facteurs, afin de connaître le devenir des populations. La théorie est récente et complexe, et il faut en général avoir recours à l’informatique pour étudier ces modèles. Les chercheurs ont développé plusieurs logiciels qui leur permettent d’aborder de nombreuses questions théoriques et pratiques concernant la démographie d’espèces très différentes et, spécialement, les questions complexes posées par la gestion et la conservation des espèces menacées. L’un de ces logiciels a notamment été utilisé avec succès dans le cas de la réintroduction du vautour fauve dans les Cévennes.

Le vautour fauve a disparu du Massif central en 1945. De 1981 à 1986, soixante et un animaux de cette espèce – en provenance d’Espagne et des Pyrénées françaises – ont été réintroduits dans les Cévennes. Cette opération est un succès, puisque la population compte actuellement presque deux cents individus. Les gestionnaires du programme (Fonds d’intervention pour les rapaces et Parc national des Cévennes) ont choisi de relâcher des vautours adultes plutôt que des jeunes. L’intérêt du lâcher d’adultes est d’obtenir plus rapidement des animaux nés en nature. En revanche, vraisemblablement du fait de leur captivité avant confrontation à l’habitat naturel, les adultes ont des capacités altérées de survie et de reproduction, ce qui n’est pas le cas pour les jeunes. Ces deux stratégies de réintroduction ont été comparées à l’aide du logiciel U.L.M. (Unified Life Models), après intégration des données mesurées sur le terrain.

La stratégie «adultes» apparaît effectivement préférable à la stratégie «jeunes»: la taille de la population naturelle obtenue est plus importante et le risque d’extinction moindre. La probabilité d’extinction est calculée en simulant l’impact de fluctuations aléatoires de l’environnement et des effectifs sur le devenir de la population. Le modèle, qui est général et paramétrable, peut s’appliquer à d’autres programmes de réintroduction pour lesquels il faut décider de l’âge des individus à relâcher. Une telle approche de modélisation et simulation paraît indispensable pour asseoir la biologie de la restauration sur des bases scientifiques solides et guider les stratégies de réintroduction.

Une théorie à construire

En dépit du nombre croissant de programmes de réintroduction, cette pratique essentielle de la biologie de la conservation souffre de l’absence relative d’un cadre théorique solide.

L’essentiel des recherches en matière de réintroduction porte sur le problème des croisements en captivité, lequel requiert des études sur les risques liés à la consanguinité, sur les perturbations comportementales entraînées par la captivité et sur les conséquences populationnelles de maladies épidémiques. De nombreux efforts sont consacrés au maintien d’une diversité génétique élevée dans les populations captives et réintroduites. Il reste cependant à évaluer dans la nature les conséquences tant de la dépression consanguine (inbreeding ) que de la dépression hybride (outbreeding ). Dans le cas des renforcements de population, l’impact des lâchers sur la population résiduelle demande les plus grandes précautions quant à l’origine des individus déplacés.

Le biais vers les aspects génétiques ne doit pas masquer le besoin d’une connaissance a priori de l’écologie des espèces réintroduites. De fait, les aléas démographiques et environnementaux sont supposées avoir un effet possible important sur les très petites populations, comme dans le cas des espèces réintroduites. En outre, tous les facteurs capables d’affecter la viabilité des populations agissent sur les taux de survie et de fécondité, quelle qu’en soit l’origine, génétique, comportementale ou environnementale. Aussi, une bonne appréciation de la démographie des espèces candidates à la réintroduction – souvent mal connue du fait de leur statut d’espèces menacées – est de première importance pour mieux cerner les possibles effets de tous les facteurs qui peuvent affecter le succès de la réintroduction.

Par ailleurs, le suivi des populations réintroduites est trop souvent négligé, bien qu’il puisse fournir une évaluation précieuse des méthodes adoptées et du succès de l’opération. On manque cruellement de critères rigoureux pour cela. Il faudrait des estimations précises des paramètres démographiques, fondement d’une modélisation possible de divers scénarios de la dynamique de la population, incluant des événements catastrophiques hypothétiques. La reproduction effective du premier individu sauvage né dans l’aire de lâcher peut néanmoins être utilisée comme critère à court terme du succès de la réintroduction.

Il faut souligner que les réintroductions, en tant qu’expériences à grande échelle, constituent un cadre précieux pour des études écologiques sur la dynamique de la biodiversité, qui présentent un intérêt fondamental. Tout d’abord, les réintroductions concernent des espèces rarement étudiées dans la nature. Le suivi de telles populations réintroduites ou renforcées constitue donc une excellente opportunité pour étendre nos connaissances sur une plus vaste gamme de modèles animaux et végétaux. Ensuite, les populations réintroduites pourraient présenter des caractéristiques induites par la colonisation, phénomène rarement étudié dans la nature, bien que fortement mis en relief par les études récentes du fonctionnement des métapopulations. Enfin, les programmes de réintroduction pourraient faciliter les études du rôle des espèces clés dans l’organisation des communautés.

5. La biologie de la conservation

Définition

L’émergence de la biologie de la conservation est une réponse de la communauté scientifique à la crise d’extinction actuelle. De fait, les changements planétaires induits par l’homme précipitent le plus grand épisode d’extinction que la vie ait connu depuis la disparition des dinosaures, il y a 65 millions d’années. Si nous ne réagissons pas rapidement et de façon significative, la génération suivante n’aura pas la même opportunité de redresser la situation à laquelle nous faisons face.

Ainsi, la biologie de la conservation est bien, dans tous les sens du mot, une discipline de crise: elle doit passer du statut de science qui enregistre des catastrophes à celui d’une science d’action, qui permette d’élaborer des plans scientifiquement fondés pour empêcher les catastrophes écologiques. C’est une nouvelle discipline de synthèse qui applique les principes de l’écologie, de la biogéographie, de la génétique des populations, de l’anthropologie, de l’économie, de la sociologie, etc., au maintien de la diversité biologique sur l’ensemble de la planète.

La biologie de la conservation présente trois spécificités:

– Elle s’appuie maintenant sur une base théorique et intègre des modèles écologiques et génétiques appliqués à des situations du monde réel.

– Alors que la conservation traditionnelle s’enracine largement dans une philosophie économique de type «utilitaire», dont la motivation première est de maintenir des productions élevées (on s’intéresse à un petit nombre d’espèces – cerfs, truites, essences d’arbre, etc., dont on cherche à maximiser la production – au détriment de la biodiversité), la nouvelle biologie de la conservation accorde de l’importance à l’ensemble de la biodiversité et lui attribue une valeur intrinsèque. Elle considère, dans cette perspective, que la gestion doit être orientée vers la biodiversité et les écosystèmes planétaires plutôt que vers quelques espèces particulières. Des écosystèmes intacts et diversifiés, au fonctionnement durable, apparaissent comme essentiels, véritables «systèmes support de vie» nécessaires pour notre propre développement en tant qu’espèce.

– Enfin, la nouvelle biologie de la conservation – et il conviendrait pour cela de parler plutôt de sciences de la conservation, sinon d’écologie de la conservation – embrasse les contributions d’autres disciplines. En particulier, elle reconnaît pleinement que l’apport des sciences sociales, de l’économie, de la science politique peut avoir finalement plus d’impact dans les avancées et la portée réelle de la conservation que les sciences biologiques elles-mêmes.

Principes et caractéristiques de la biologie de la conservation

La biologie de la conservation moderne est dominée par trois idées majeures: la vie sur Terre est marquée par le changement évolutif, par une dynamique écologique et par l’omniprésence de l’homme. Elle reconnaît sept principes pour la mise en œuvre d’une conservation durable de la biodiversité. Ces principes, énoncés dans une synthèse publiée en 1996 par M. Mangel et ses collaborateurs, reposent sur trois constats:

– l’ensemble des principes considérés antérieurement pour la conservation des ressources vivantes sauvages demandait une mise à jour;

– ceux-ci ne furent pas aussi efficaces qu’ils auraient dû l’être, probablement parce qu’ils manquaient de mécanismes de mise en œuvre;

– tous les problèmes de conservation comportent à la fois des aspects scientifiques, économiques et sociaux, et ceux-ci doivent être inclus dans les solutions proposées.

Principe no 1: «Le maintien durable de populations saines pour l’ensemble des ressources biologiques sauvages n’est pas compatible avec une croissance illimitée des besoins et des demandes des hommes pour ces ressources.»

On ne saurait, en effet, concevoir la possibilité d’une croissance infinie dans un système fini. La population humaine ne peut augmenter indéfiniment sans porter atteinte aux ressources naturelles qui lui sont nécessaires. Aussi, l’élément de base le plus critique pour tout effort de conservation est la stabilisation puis l’infléchissement de la population humaine et de la pression qu’elle exerce sur la biosphère et ses ressources. De fait, pour que les conditions d’un développement durable soient accomplies, il faut que les hommes exploitent leurs ressources de manière à en permettre le renouvellement naturel: qu’ils apprennent à vivre des intérêts sans affecter le capital.

Principe no 2:«Le but de la conservation devrait être d’assurer toutes les options d’utilisation présentes et futures en maintenant la biodiversité dans toutes ses composantes, génétique, spécifique et écosystémique.»

Cet objectif suppose: de gérer la pression exercée sur les écosystèmes de manière à préserver leurs traits essentiels; d’identifier et de protéger les zones, espèces et processus qui sont particulièrement importants pour la sauvegarde des écosystèmes; d’éviter autant que possible la fragmentation des aires naturelles.

Principe no 3: «L’évaluation des possibles effets écologiques et socioéconomiques de l’utilisation des ressources naturelles devrait précéder toute mesure d’extension ou de restriction de celle-ci.»

Traditionnellement, l’utilisation des ressources naturelles est fondée sur la conviction que les propriétaires des ressources ont le droit d’en faire ce qu’ils veulent; si une ressource n’est la propriété de personne, elle peut être utilisée par tout le monde, et cette utilisation ne peut être restreinte sauf si quelque individu ou entité légalement habilité s’y oppose. Or la mise en œuvre de ce dernier principe pour une conservation durable de la biodiversité suppose des conditions sensiblement différentes. Il faut en particulier identifier les incertitudes et les présupposés relatifs au cycle de vie, à l’état et au rôle dans l’écosystème de l’espèce ressource considérée ainsi qu’à l’impact du contexte socioéconomique.

Principe no 4: «La réglementation relative à l’utilisation des ressources vivantes doit reposer sur la connaissance de la structure et de la dynamique de l’écosystème concerné et prendre en compte les influences écologiques et socioéconomiques qui affectent directement et indirectement l’utilisation de ces ressources.»

Principe no 5: «La gamme complète des compétences et connaissances, apportées par les sciences de la nature et de la société, doit être mobilisée pour traiter des problèmes de conservation.»

Il faut en particulier:

– impliquer la totalité des disciplines nécessaires au stade le plus précoce possible;

– reconnaître que la science n’intervient qu’en partie dans la conservation des ressources vivantes, limitée à l’investigation et à la description de certaines catégories de phénomènes et processus; ainsi, la science peut être utilisée pour fixer les limites des activités compatibles avec les objectifs de la conservation, y compris les incertitudes sur ces limites, mais elle ne peut dicter à la société où celle-ci doit opérer dans le cadre de ces limites;

– demander de larges consultations, parce que, potentiellement, toutes les questions de conservation ont des implications biologiques, économiques et sociales et que l’ignorance de l’une ou de l’autre de ces composantes peut conduire à des conflits défavorables à une conservation effective.

Principe no 6: «Toute conservation efficace suppose la prise en compte et la compréhension des motivations, intérêts et valeurs de tous les utilisateurs et acteurs en cause.»

Cela suppose de donner la responsabilité de gestion aux groupes d’intérêts locaux, ce qui accroît les motivations à conserver, spécialement s’il existe un lien entre l’activité de conservation et les bénéfices apportés par cette activité.

Principe no 7: «Une conservation efficace demande une communication interactive, réciproque et continue».

L’information et la sensibilisation des populations locales et du public est, en matière de conservation, un élément essentiel pour un succès durable.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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